Berliet, Unic, Renault, Saviem… Stars des années 50 !
A partir de 1948, la reprise économique pointe son nez mais les grandes entreprises de transport sont encore peu nombreuses. Les transporteurs sont souvent des « patrons chauffeurs », des artisans qui ne possèdent que trois ou quatre camions en moyenne et ont commencé leur carrière avec un seul véhicule. Dès lors, on peut s’imaginer l’importance que revêt l’achat d’un nouveau camion ! Allons faire un petit tour avec eux chez les principales marques de poids lourds.
GLR, GLC, GLM… la gamme « mécano » :
Reconnaissables au premier regard, les Berliet « museaux ronds » ont une identité très affirmée, mais au-delà du look, ils vont symboliser la renaissance du constructeur lyonnais. Les GLC, GLR et GLM visent en effet à remplacer les GDC, GDR et GDM d’avant-guerre. L’objectif du Bureau d’Études est de rationaliser l’industrialisation des véhicules en standardisant les composants des moteurs et l’habitacle des cabines. Cette mise en commun des pièces principales va réduire ainsi les coûts de fabrication, mais également simplifier le service après-vente (réparation, gestion des pièces de rechange, temps d’immobilisation du véhicule…) ce qui est un avantage appréciable pour le client.
Unification, standardisation !
Les nouveaux moteurs de la gamme auront tous la même dimension de cylindre : 120×140. On va donc jouer sur leur nombre pour atteindre la puissance requise. Deux types de culasses et un type de cylindre suffiront pour la motorisation des trois châssis dont la sortie va s’échelonner entre 1949 et 1953 :
– 1949: Berliet GLR avec moteur 5 cyl. (une culasse de deux cylindres et une culasse de trois cylindres)
– 1951 : Berliet GLC avec moteur 4 cyl. (deux culasses de deux cylindres)
– 1953: Berliet GLM avec moteur 6 cyl. (deux culasses de trois cylindres)
La cabine « semi-avancée » Berliet
Jusqu’alors, les camions Berliet avaient une cabine normale ou avancée. La nouvelle disposition « semi-avancée » cumule les avantages des deux autres : capot raccourci, meilleure visibilité, longueur carrossable augmentée derrière la cabine… Elle est la première cabine « tout-acier » de Berliet. Conformément à l’objectif de normalisation, les GLC, GLR et GLM ont un habitacle de cabine commun : seule diffère la longueur du capot.
Les chauffeurs habitués aux anciens Berliet à long nez, types GDC, GDR et GDM, seront un peu déroutés par cette nouvelle cabine moins spacieuse mais à l’usage, ils vont en apprécier le confort accru. Le poste de conduite dispose en effet d’un siège baquet réglable en hauteur, d’un plafonnier électrique… Le pare-chocs est arrondi pour améliorer la surface balayée nécessaire au braquage et la sécurité en cas de collision.
Le Berliet GLR : favori des transporteurs !
Situé en milieu de gamme, le GLR est un véhicule polyvalent qui satisfait les professionnels de l’époque : ce succès est basé sur une robustesse inégalée et surtout un approvisionnement rapide et peu coûteux en pièces de rechange, facilité par le réseau très performant du service après-vente Berliet.
Cette grande simplicité d’entretien est un des points forts du GLR. Son gabarit et sa structure permettent une bonne répartition des charges et autorisent des utilisations variées, tant dans les transports routiers que dans les chantiers et services divers… Bref, le Berliet GLR est l’outil de travail par excellence !
Une marque en plein essor et une cabine « unique »
En difficulté après la guerre, Unic opère une remontée spectaculaire qui va le hisser au deuxième rang des constructeurs français de camions, derrière Berliet. Cette consécration est le fruit d’une série d’efforts de modernisation qui commence en 1945, avec le rajeunissement des moteurs « Z » et la standardisation des pièces. Déclinés en 4 ou 6 cylindres, les moteurs baptisés ZU vont être équipés d’un seul modèle de culasse pour deux pistons. Tous les cylindres ont un alésage de 118 et une course de 150.
Une cabine au design très « sixties »
A partir de 1954, Unic va doter sa nouvelle gamme d’une très belle cabine aux lignes audacieuses. Cette cabine tout-acier préfigure un rajeunissement complet des modèles à partir de 12 tonnes jusqu’à 35 tonnes. Parmi ses points forts, on note une surface vitrée, des glaces de custodes et un volume intérieur supérieurs aux modèles de la concurrence. Proposée à ses débuts avec une calandre à trois barres chromées, elle prend le nom de « cabine Longchamp » en 1956 et équipe la célèbre gamme des « cols » (Galibier, Puymorens, Izoard, Tourmalet, etc.).
Des véhicules plébiscités par les chauffeurs routiers
La position du moteur à l’avant de l’essieu assure une bonne tenue de route au camion, qu’il soit chargé ou à vide. Les Unic sont réputés pour la sobriété du moteur « ZU » qui fume peu, même à froid et dont le vrombissement est parait-il, reconnaissable entre tous. Les utilisateurs apprécient également leur facilité de démarrage par tous les temps mais ce qui séduit le plus les conducteurs de l’époque, c’est la maniabilité de la boîte 8 vitesses bien étagées à 4 rapports et réducteurs pneumatiques à commande pré-sélective : une rareté dans les années 50 ! Parmi les atouts des Unic, notons aussi que les modèles de moyen tonnage sont d’une constitution légère et peuvent transporter une charge utile équivalente à deux fois le poids mort du véhicule. .
Dans cette volonté d’allègement, le constructeur a fait le choix de l’aluminium pour certains composants de ses moteurs. Il en résulte cependant quelques soucis : le moteur peut souffrir notamment de fuites d’huile entre le carter de la ligne d’arbres en aluminium et le bloc cylindre en fonte. La gestion du service après-vente fait d’ailleurs apparaître un autre point faible de Unic : son réseau de concessionnaires est moins étoffé que celui de ses principaux concurrents.
Renault : un moteur SOUS le châssis
En 1950, la toute jeune Régie Nationale sort un camion d’une conception très différente de ses concurrents : le moteur à plat est repoussé à l’arrière de la cabine. Cette disposition permet de dégager un bel espace et supprime les inconvénients du moteur dans l’habitacle. L’idée est originale et unique en France ! A l’époque, le seul autre constructeur de véhicules utilitaires ayant fait le pari du moteur à plat sous le châssis est l’allemand Büssing.
Une allure un peu désuète mais un confort au quotidien.
Baptisé R4140 puis R4153 dans sa version 7 tonnes, le camion est loin d’avoir une ligne élégante mais les chauffeurs l’apprécient pour l’agrément de sa vaste cabine surbaissée, garnie d’une large banquette qui autorise jusqu’à 3 passagers de front. Ils aiment également sa grande maniabilité : les roues avant n’étant pas gênées par le moteur, elles peuvent braquer très facilement.
Sous-motorisé mais très utilisé
Ce Renault est toutefois célèbre pour une caractérique notable : la faible nervosité de son moteur couché qui lui vaut d’être surnommé « Fainéant» par ses utilisateurs. En outre, cette position couchée ne facilite pas l’accessibilité du moteur lors de l’entretien, surtout lorsque le véhicule est pourvu d’une carrosserie enveloppante type isotherme. Niveau tenue de route, le châssis placé très haut au-dessus du pont, rend le camion moins stable en charge qu’un véhicule au châssis plus classique.
Peu puissants mais maniables et polyvalents, les Renault « Fainéants » seront très utilisés dans les transports courtes distances et régionaux. Après 1955, les 7 et 5 tonnes Renault sont rebaptisés « Tancarville » et « Mondragon » sous la marque Saviem.
SAVIEM… Zoom sur les camions JL
Fin 1955, le département Poids lourd de Renault s’associe à Latil et Somua pour donner naissance à SAVIEM LRS. Renault, régie nationale, est de loin l’entité la plus puissante aux côtés de Somua et Latil qui sont des entreprises privées. En 1959, Renault devient l’actionnaire majoritaire de Saviem. les initiales Latil-Renault-Somua disparaissent de la marque et sont remplacées par le losange.
Les JL d’origine Somua : des routiers de qualité.
Somua apporte dans « la corbeille de mariage » de Saviem, son dernier véhicule vedette : le JL19.
Ce camion va survivre 3 ans sous la bannière Saviem. Il s’efface en 1958 pour laisser la place au JL20 qui reprend l’intégralité de la mécanique de son prédécesseur. Cette fois, la cabine est rajeunie : l’arrière de la cellule reste le même mais l’avant est doté d’une nouvelle calandre, la « 830 », qui sera montée par la suite sur les autres camions de la gamme unifiée Saviem (JL21, J23, JL25).
Officiellement la marque Somua n’est plus… mais elle perdurera quelques années à travers le JL20. Les transporteurs longue distance de denrées périssables tels que les primeurs, apprécieront particulièrement ce camion pour le rendement et la fiabilité de son excellent moteur D615, 6 cylindres 115×150, licence Lanova.
1960 : naissance d’une identité visuelle « Saviem »
Cette année-là, afin de proposer des camions à l’esthétique unifiée, Saviem va renouveler sa gamme moyenne en sortant les JL21, JL23 et JL25 : l’avant des cabines ressemble au JL20 mais les véhicules n’ont plus rien de Somua : ils résultent d’un assemblage de trains roulants Latil, équipés du moteur Renault « Fulgur ».